DECEMBRE 2013 - Le Caire, Egypte
L'hiver, lorsque je pose mes pieds pour la première fois dans ce grand pays pour y mener une exposition avec mon cher ami Ahmed Shebita, est particulièrement rude et la neige a recouvert une grande partie du Moyen Orient s'arrêtant seulement à quelques encablures des grandes Pyramides.
Cela fait maintenant 4 mois que le régime de Morsi a été renversé par la population et les portraits du Général Sissi, le président par intérim, sont omniprésents dans les habitations, sur les voitures, dans les boutiques et en posters dans toutes les rues.
Quelques affiches de soutien à Morsi sont certes présentes dans certains quartiers mais elles sont rapidement dégradées par les passants. En effet, après l'immense espoir soulevé par le renversement du "Pharaon" Moubarak, la prise de pouvoir - par la force et le menace m'a t-on maintes fois affirmé- par les frères musulmans a fait basculer l'Egypte dans la consternation, l'incompréhension et, plus important que tout le reste, dans une grave crise existentielle et économique.
4 MOIS que la seconde révolution a eu lieu, l'incompréhension est omniprésente, les touristes absents
Il est ainsi facile de constater que les temps sont devenus difficiles pour tout le monde. L'économie est certes tombée en lambeaux mais au moins le calme est revenu dans les rues de cette ville tentaculaire même si quelques attentats sporadiques ont lieu en cette fin d'année.
Les évènements ont eu ce mérite de souder une majorité de musulmans et de coptes dans le même élan pour sauver le pays! La capitale s'est couverte de décorations de noël et les conversations dans les bars vont bon train au sujet de l'avenir de l'Egypte.
Le premier sujet de conversation qui revient sans cesse est de savoir comment sont perçues les révolutions en dehors du pays et plus particulièrement en Europe. L'incompréhension est partout présente car nul ne comprend comment la communauté européenne et les USA ont pu prendre position pour Morsi et les frères musulmans au détriment de la volonté du peuple égyptien.
Ils sont eux au contraire très fiers d'avoir pu renverser ce régime grâce à d'immenses manifestations un peu partout dans le pays.
Imaginez donc un peu, plus de 25 millions de gens dans la rue, réunies dans un même élan pour chasser un pouvoir qui n'a eu pour seul mérite que de fédérer contre lui.
un peuple courageux et résilient
Dans la même veine, il est devenu rare de voir un café diffuser une chaine du bouquet Al Jazira, la chaine de télévision considérée comme traitre à l'Egypte de par ses prises de position en faveur des frères musulmans. Il est des blessures qui auront du mal à se refermer...
De ce fait, l'Egyptien de la rue se sent abandonné par l'occident, lâché par une partie du Moyen Orient et est en proie à de graves difficultés pour survivre. Heureusement, partout la solidarité est présente et on ne croise que peu de mendiants dormant dehors dans les rues. Cela change de Paris...
Mais au final, le plus impressionnant est de voir l'espoir qui habite chaque habitant du Caire. Tous sont persuadés que le pays va s'en remettre et tous sont prêts à répondre à l'appel d'un vrai leader charismatique qui saura les guider en dehors de l'ornière.
une foi inébranlable en l'avenir
Car toute l'Egypte n'attend que ça, un homme qui sache leur parler, les faire rêver et qui saura dépasser les divisions séculaires du pays pour mener tout un peuple sur la route de la fierté et du développement.
Et tout le reste, finalement, n'importe que très peu. Il se trouvera toujours un égyptien pour rappeler que depuis près de 5 000 ans, ce pays a toujours été mené par des hommes forts qui ont su lui donner tout son rayonnement.
"Fichez nous donc la paix avec votre démocratie! Cela ne marchera jamais dans notre pays. Essayez d'abord de nous comprendre plutôt que de nous imposer un système qui n'est pas adapté à notre histoire et notre culture".